J’écris depuis que j’ai eu douze ans, en 1968. Pour moi, pour mon plaisir. Cela ne veut pas dire que je n’ai pas besoin de lecteurs mais jusqu’à présent je ne ressentais pas l’envie d’aller plus loin que dans le cœur de mes proches. Du journal au roman, du poème à la nouvelle et dans de nombreux domaines, j’ai essayé pendant ces quelques dizaines d’années, parfois facilement, légèrement, rapidement, parfois avec difficulté, sur de longues années, sur des textes aussi abandonnés. Si cela vous plait, n’hésitez pas à m’envoyer un message, cela me poussera à vous proposer toujours d’autres textes. |
(2020) au menu : – L’ascenseur ne s’arrête pas toujours sur le quai (nouvelle) – La lame (poème) – Quelques parts (poème) – Un pas de trop (nouvelle) – Le vieux beau du marais (poème) – Ar C’hellenn (extrait de roman) – Le piano et la mer (poème), à Brigitte – La musique et la mer (poème) – La feuille morte (poème) |
L’ascenseur ne s’arrête pas toujours sur le quai
Cette petite nouvelle a pour cadre le métro de Rennes :
Pour le plaisir, un court poème écrit le tout dernier jour de 2004 au lendemain du terrible tsunami :
La lame
Les larmes ont renversé leurs cœurs
La lame a traversé leurs corps
Les visages coulent, les rivages pleurent
Sous les ondes roule la mort
(in Chambres de bonnes)
Ce jour-là, je m’ennuyais lors d’un stage pédagogique et j’ai écrit ce petit texte en forme de clin d’œil :
Quelques parts
Quelqu'un Qu'à deux Qu'on dit Que vains Qu'on dit Qu'à deux Qu'on vint Qu'il part Quelque part (Merci Michaux - 16 novembre 2011) (in Chambres de bonnes)
Un pas de trop
L’écriture de la nouvelle a été inspirée par la forte personnalité d’un leader politique français.
L’idée est de mêler étroitement le fond et la forme, le personnage et la narration.
En ce début juin un peu particulier où le mot liberté a un parfum inconnu, j’ai longé la Vilaine en vélo sur quelques dizaines de kilomètres et ai rencontré une nature heureuse. Dans les méandres du fleuve, j’ai rencontré le chant amoureux et dithyrambique des grenouilles et crapauds. Je n’ai pu m’empêcher de songer à un poème malicieux que j’avais écrit à Trébeurden, devant l’orchestre philharmonique du marais du Quellen (ar C’hellenn) en 2013.
Le vieux beau du marais
Il est très tard La grenouille se pare Croisant l’astre du soir Brandit son étendard Pour chanter dans le noir Il est très tôt Sautant, le vieux crapaud Baisse son beau drapeau Sans se jeter à l’eau Il quitte les tréteaux (in Chambres de bonnes)
Ar C’hellenn
En contrebas, deux mondes s’opposent : celui de la mer et celui du marais. Le C’hellen, terre des korrigans descendus de la lande, est tout esprit. Alors que si l’on traverse la route, la mer nous jette le vent au nez, là, plus une larme d’air, plus de chant d’écume, plus d’oiseaux criards ; le silence horizontal, la quasi-immobilité, quelque chose de la torpeur tropicale. (extrait d’ Un jour,enfin – roman)
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Brigitte, aujourd’hui, tu es partie voguer dans des flots incertains. Tu aimais la mer plus que tout et tu m’avais peint ce tableau en 1996 pour mes quarante ans. Je t’avais alors dédié « Le piano et la mer » écrit quand on n’avait même pas vingt ans.
Le temps passe trop vite et nous empêche de vivre tout notre amour, celui qu’on porte à ce qu’on appelle « nos copines », celles de toujours et encore plus. Tu vas terriblement me manquer et je serai bien seul sur mon rocher (28/07/2021)
Le piano et la mer
Une, deux, trois notes Et puis s'en vont Une, deux, trois notes Et puis reviennent Le piano Inlassablement Deux mesures Et trois matelots Sur un navire en dièse Vagues blanches Vagues noires Et le roulis des doigts Regardant l'horizon Noir et queue de pie Sur des cordes de soleil Blanc ou lumière Dans les reflets de nuit La houle se déchaîne Sur les matelots Suicide Qui s'en vont en touches bleues Pour des mains en prison.
(in Zénith – Rennes le 23 octobre 1975)
La musique et la mer
faisant suite à : Le piano et la mer
Dans un vieux Port ruiné Une sirène agonise De son ventre asséché File et siffle une brise J'ai besoin d'embrasser Ces ondines qui grisent... Ce rock’n’roll qui blues Entre éclairs de musique Et roulements d'océan La cascade des guitares Dans un puits de silence Qui nous prend dans son flot Et nous jette dans sa danse L'écume qui s'embrase Sur les lèvres jaunies D'une mer enflammée Une coquille insolente Que dirige Neptune Debussy qui voyage Et pourtant reste à terre Un Chopin qui s'embarque Dans la cage de Wagner Une pluie fine que je bois Dans le désert terrestre Dans une tasse trop grande Pour un mousse égaré Je vois même la mer Dans le rouge d'un verre Je vois un bar qui s'ouvre A travers un juke-box Qui m'a mis l'âme en peine Un piano esseulé Qui trébuche dans la nuit Sur la rage d'un Jimmy Et Ferré boit un verre Sur la table d'à côté Et Ferré pompe l'espoir Que mes larmes ont versé J'ai rempli sa bouteille De gouttes évaporées Mais la sirène hurle Sur ce quai embrumé Elle jazz sur les mots Elle jase sur les flots Sent un rock qui souffle Et un slow qui s'étouffe
(in Zénith – Rennes le 2 janvier 1977)
« Noir, c’est noir, il n’y a plus d’espoir… »
Profitant de ce saut dans le temps, laissons nous guider où le vent nous mène, jusqu’au tout premier texte encore existant, tracé au charbon. L’adolescence est souvent une période d’incertitude où le destin semble nous échapper et la vie un drame patent.
Il faut excuser l’emphase et remarquer l’influence très forte des romantiques du 19ème siècle dans le choix des thèmes et la construction poétique.
C’est promis, tous les textes ne sont pas aussi désespérés !
La feuille morte
Je ne suis qu'une feuille morte Volant ici et là au hasard de la vie, Cette brise incertaine qui m'emporte, Qui me brise et me porte dans l'âtre infini. Dans le feu de l'enfer, dans le noir de la guerre, Dans le sang par le fer, puis le corps dans la terre ; La Mort est là, enveloppée dans son voile noir, La faux cachée, guettant l'homme du maudit soir. La Mort est là ! Pleurez bonnes gens et même riez Si vous voulez, vous l'avez mandée et vous me traînerez Dans l'infini du temps, dans l'antichambre de la fin Où Elle viendra me chercher, moi, l'éternel défunt. Depuis qu'on m'a pensé, je ne suis qu'un pantin, Sans tête ni corps ni membres, emprisonné dans vos poings, Dans cette pièce peinte en noir, bureau permanent, 0ù elle nous appelle, nous ses jouets prisonniers du temps. Coule, coule vie morte ; comme un torrent de sang, Éclabousse notre pâle visage inondé de la sueur du malheur, Tu es insaisissable, filant entre nos doigts ; notre cœur Ne t'en veut pas, c’est nous qui t'avons tuée au fil des temps.
(in Zénith – Quintin hiver 1973-1974)
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